Le paysage constitue le terrain fécond où la géographie et la photographie peuvent partager des regards. Debout dans la beauté du monde, géographe et photographe sont saisis par un moment esthétique qu’ils questionnent, capturent et rationalisent à l’aide de leurs outils respectifs. Pour le géographe, les formes du paysage émergent de trajectoires porteuses de désirs et d’espérances. Ces formes s’inscrivent dans une morphogenèse : elles acquièrent un sens qu’il peut mettre en récit grâce à leur position relative les unes par rapport aux autres, un peu comme les mots dans une phrase. Le photographe est dans une position similaire et pourtant différente : bien qu’il se présente comme le témoin contemporain de nos trajectoires et du devenir de nos paysages, il peut également engager leurs formes dans de nouvelles relations afin de les inscrire dans son propre récit, en transformant leur sens par son langage photographique. Pour Rémi Guertin, les formes du paysage et les discontinuités qui le structurent s’annoncent comme le creuset où deux démarches en apparence si différentes peuvent dialoguer autour de dimensions partagées : symboliques, concrètes, théoriques, artistiques. Mais comment un tel dialogue peut-il se déployer?
L'auteur explore les possibilités d'un tel dialogue par le truchement d’un essai photographique intitulé Québec, banlieue du patrimoine mondial. Habitant Québec depuis toujours et fort de ses travaux de recherche sur la morphogenèse de la ville, il y disloque le mythe de la Vieille Capitale qui, en magnifiant son passé, nous empêche de voir la ville telle qu’elle est aujourd’hui : ordinaire et imparfaite, mais aussi vibrante dans son charme et sa banalité quotidiennes.
